For the english version of this post, it’s over there.
A environs 2142 miles marins de Plouarët-Tregor, Nord-Nord-Est, deuxième mouette à gauche puis troisième vague à droite, se trouve un coin de rocher assez particulier. A cheval sur la dorsale médio-océanique, fille d’éruptions sous-marines incessantes et dotée d’une activité géothermique considérable, il s’agit d’une île en perpétuelle évolution, et un pur joyau encore très sauvage. Dotée de paysages mêlant fjords, volcans, montagnes, plaines lunaires désolées, plages de sable noir et autres visions assez dantesques, pas étonnant qu’elle soit devenue une destination prisée par le touriste en mal de paysages nordiques, d’aurores boréales (en hiver) et de champs de cailloux (ça c’est toutes saisons).
L’ISLANDE
Etant très fréquentée malgré son climat et son relatif éloignement, je ne vais pas m’étendre sur une présentation « exhaustive » du coin et de tout ce qu’il a à offrir. Déjà parce que je ne m’y connais pas tant que ça, ne m’y étant rendu qu’en deux occasions, mais surtout parce que la masse d’information disponible sur le coin en trois coup de clics fait que ça deviendrait vite chiant et redondant. Au lieu de ça, je vais me concentrer sur le Laugavegur (ou Laugavegurin), l’une des randonnées les plus belles de l’île, ainsi que l’une des plus célèbre.
Avant ça, un petit récap’ rapide de l’histoire islandaise, ça pose bien le sujet et comme tout territoire nordique, c’est une épopée en soi.
Sommaire
HISTOIRE DE L’ISLANDE
Agée d’à peine 15 millions d’années, une vraie jeune fille, l’île s’est formée sur un point chaud de la dorsale médio-atlantique entre la plaque nord-américaine et la plaque eurasienne, l’un des deux seuls endroits au monde où le plancher d’une dorsale océanique est émergé. Cette séparation est même directement visible sur la terre ferme, notamment dans la vallée de Þingvellir, haut lieu de l’histoire islandaise d’ailleurs. Cette particularité entraine forcément une activité géologique et volcanique très intense, dont les islandais ont su tirer parti, tout en craignant les fréquentes éruptions capable de paralyser jusqu’à tout un continent avec un nuage de fumée et un nom imprononçable.
« Découverte » au milieu du IX ème siècle par des vikings norvégiens un peu paumés, l’île a vraisemblablement été visitée bien avant ça par un possible grec quelques siècles avant Jean-Claude, ainsi que par des moines irlandais bien perdus eux aussi. C’est le viking suédois Garðar Svavarson qui constate l’insularité de l’Islande en en faisant le tour, et décide de fonder une petite colonie du nom de Húsavík dans un fjord abrité du nord-ouest, ville toujours existante à l’heure actuelle d’ailleurs. Fun-fact, lorsque Svavarson décide de mettre les voiles, il abandonne derrière lui un esclave évadé, celui-ci devenant de fait le premièr résident “officiel” de l’Islande. Enfin, l’île obtient son nom après la visite d’un troisième visiteur norvégien, Flóki Vilgerðarson, qui s’y pèle tellement les miquettes qu’il décide d’appeler l’endroit Terre de glace, ou Islande.
La colonisation proprement dite commence au Xème siècle, majoritairement issue du sud-ouest de la Norvège, sous forme de communautés disparates possédant chacune leurs lois et sociétés propres. Plusieurs chefs se disent alors qu’il serait sympa de mettre un peu d’ordre dans tout ce bordel et mettent en place l’état libre islandais en 930. L’Alþing, ou parlement (le tout premier du monde) est érigé à Þingvellir, et ainsi commence l’âge des sagas, où les viking islandais commencent à naviguer, explorer et piller les alentours apportant paix et prospérité à la jeune nation. Pour le moment…
Voilà pour la fondation. Les siècles suivant forment un joyeux bordel et voient la première Islande indépendante être évangélisée, passer sous le joug norvégien vers 1262, puis danois en 1536, période à laquelle l’île s’enfonce de plus en plus dans la pauvreté. Bien plus tard, en 1918, elle obtient enfin son indépendance, tout en gardant une « union personnelle » avec le Danemark. Un genre de PACS étatique un peu étrange. Enfin, le 17 juin 1944, la république d’Islande devient enfin un pays indépendant à part entière. Fiou.
Petit aparté sur la langue, L’islandais est issu du vieux-norois, la langue pratiquée dans les pays scandinaves à l’époque viking ayant donné naissance au danois, suédois et norvégien. Contrairement à ces pays, et du fait de son isolement, cette langue a très peu évolué en Islande au fil des siècles, et l’occupation danoise n’a pratiquement pas eu d’effet sur celle ci, ce qui explique que l’Islandais conserve l’alphabet norois original bien que celui ci a disparu du reste de la Scandinavie. De plus, depuis le XVIIIème siècle, les autorités locales maintiennent la « pureté » de la langue en créant de nouveaux mots adaptés au monde moderne sans recourir à l’emprunt extérieur. Les islandais parlent donc pratiquement comme leurs lointains ancêtres, et ça c’est plutôt cool, mais heureusement pour les touristes l’anglais est appris très jeune. Pas besoin de se taper l’intégral des sagas pour pouvoir commander une bière.
L’Islande actuelle est donc un pays fort économiquement, bien que la crise de 2008 soit passée par là, avec un niveau de vie et de développement personnel élevé comme beaucoup de pays nordiques. Dépourvue d’armée, mais doté d’une forte conscience géopolitique (au point de déclencher trois « guerres de la morue », forçant le Royaume-Uni à faire escorter ses chalutiers par des bâtiments de guerre…), elle a occupé une place stratégique durant la guerre froide et est membre de l’OTAN, l’ONU et du conseil de l’Europe, bien qu’ayant retiré sa candidature pour une éventuelle adhésion à l’UE, question de quota de pêche encore une fois. Bref, l’économie de l’île est avant tout basée sur la pêche, l’industrie de l’aluminium, et bien sûr, le tourisme.
Sur cette note, L’Islande offre des paysages somptueux, parfois un peu difficile d’accès, mais il y en a vraiment pour tous les goûts. Le fameux cercle d’or, constitué du parc national de Þingvellir, des chutes de Gullfos et de Geysir – ayant donné son nom aux geysers – demeure le point d’entrée le plus simple touristiquement parlant et saura contenter familles et voyageurs pressés très facilement. Les fjords du nord-ouest et la partie septentrionale du pays se méritent déjà plus, mais sont parfaits pour un road trip à velo / voiture / charette ou pour les amateurs de surfs en eau froide. Enfin l’intérieur du pays avec ses routes de sable noir, ses glaciers et son climat schizophrène représentent le summum de l’expérience islandaise pour tout randonneur aguerri ou non (sachant tout de même lire une carte et les prévisions météos). Ce qui nous amène à la deuxième partie de ce texte:
LE LAUGAVEGUR
La randonnées précise que je vais présenter ici est donc celle dite du Laugavegur, ou Laugavegurinn (la route des sources chaudes), une marche longue de 54 kilomètres pouvant se parcourir en trois ou quatre (voir cinq) étapes suivant l’envie, et reliant le site du Landmannalaugar à la vallée de Þórsmörk. Une étape supplémentaire peut-être ajoutée pour rejoindre Skógar en bord de mer, que je détaillerai un peu en bonus. Cette randonnée peut se faire dans les deux sens, mais le départ du centre permet un dénivelé négatif pour une grande partie du trajet. Un départ de Þórsmörk (ou Skógar) permet par contre de découvrir des paysages plus splendides chaque jour, au prix de montées parfois casses-genoux. Question de goûts.
Cette randonnée est l’une des plus célèbre d’Islande pour de bonnes raisons. Ni trop courte ni trop longue, elle permet d’observer une multitudes de paysages tous plus incroyables les uns que les autres, ponctués de sources chaudes crachant leur volutes bouillonnantes de vapeur et agrémentant la marche de quelques oasis de vie. Relativement facile, surtout au départ du Landmannalaugar, les étapes sont suffisamment courtes pour avoir le temps – et l’énergie – d’explorer les sites entourant les refuges et découvrir certains des plus beaux points de vues pouvant facilement être oubliés. Enfin, le chemin est clair, bien balisé et doté de plusieurs pistes d’accès en cas d’accident de parcours.
Même si l’on reste assez loin de l’autoroute de randonneurs, ces nombreux avantages entrainent bien sûr une fréquentation estivale assez importante, avec tous les petits tracas que cela comporte. Les places dans les refuges sont limitées et partent donc très vite, quand au camping, on peut rapidement se retrouver serré dans un mini village de tentes avec des voisins pas toujours très discrets (J’espère d’ailleurs que Ragnar a fini par soigner sa p*** de toux). Mais on ne se marche pas dessus non plus durant la journée, et ces inconvénients mineurs ne gâchent en rien l’expérience, même s’il peut toujours être utile de penser aux boules Quies.
Un autre élément perturbateur peut être la météo. Là, c’est la roulette russe car les conditions météorologiques changent constamment, et les prévisions même sous 24h sont loin d’être fiables. En plus de la pluie, désagréable mais non bloquante, les conditions peuvent se détériorer rapidement avec brouillard, fort vent et tempête, auquel cas il est possible de se retrouver bloqué en refuge si l’on ne dispose pas de GPS. Et même dans ce cas, il faut vraiment avoir envie de se taper un vent de face enneigé sur 15 kilomètres sans rien voir du paysage.
Concernant l’orientation d’ailleurs, vous trouverez sur ce site une carte en ligne très bien foutue (ainsi que beaucoup d’informations complémentaires). Vous pouvez aussi cliquer sur mes titres d’étapes pour obtenir quelques annotations personnelles réalisées de manière extrêmement professionnelle.
Dans tous les cas, il est toujours préférable de se laisser quelques jours de rab’ sur cette marche, (ce qui est plus facile lorsque les nuits en refuge ne sont pas réservées). En cas de temps pourri, il est alors possible d’attendre que la météo s’améliore avant de se lancer, quitte à passer un jour de plus sur un camp. Une bonne fourchette est de se donner dix jours en Islande, pour cinq jours de marche. Si tout se passe bien, ça laisse trois ou quatre jours pour découvrir d’autres coins en comptant le transport, et si la météo fait des siennes sur le parcours, cela laisse une bonne marge de sécurité.
Bon, tout ça c’est très bien, mais rentrons maintenant dans le vif du sujet. Ce que je vais présenter ci dessous concerne ma propre expérience, et peut être aisément adapté au plaisir de chacun. J’y suis allé très cool, et les dieux de la météo ont été en ma faveur, mais bien sûr tout ceci est purement indicatif. Résultats non contractuels.
La randonnée débute dans le massif du Landmannalaugar, reliquat d’une activité volcanique acide intense, donnant au paysage des teintes ocres, jaunes, rouges et bleues autour d’une champs de lave d’où s’élèvent quelque fumeroles issues de la géothermie souterraine. Bref, il s’agit tout simplement d’une des plus belles régions de l’Islande, et c’est un sacré haut-fait quand on connait la concurrence.
L’option la plus simple pour accéder au site est le transport en bus au départ de Reykjavik. Plusieurs entreprises locales proposent ce service, permettant pendant quatre heures d’être secoué dans tous les sens dans un bus 4×4 sur les pires chemins de terre ayant jamais été appelés « routes ». Ha oui, pour info, du fait de son climat (et de l’activité volcanique à certains endroits), l’unique route asphaltée sur toute sa longueur est la route N°1, réalisant le tour de l’île. Il n’est pas rare de tomber directement sur une piste de terre dès que l’on s’en éloigne de quelques kilomètres. Piste de terre accueillante au premier abord, qui se transforme bien vite en montagnes russes assassines de véhicules de location.
Je conseille un départ tôt de Reykjavik (aux alentours de 7:30, 8:00), ce qui permet une arrivée sur le site en tout début d’après midi. Dans ce cas là, deux options : Soit démarrer directement la marche vers la première étape, Hrafntinnusker, distante d’une douzaine de kilomètres, soit profiter de l’après midi pour découvrir plus en profondeur le Landmannalaugar et les splendides points de vue qu’offre le site aux voyageurs moins pressés. Ces petites randonnées, décrites dans un mini guide en vente au refuge, peuvent être assez fréquentées, du fait de la présence des marcheurs venus se perdre pour la journée.
Néanmoins, je conseille de passer au moins une nuit dans cet endroit magique. Il s’agit bien d’un des plus beau lieu d’Islande, et partir en coup de vent serait dommage. S’il n’y avait qu’une seule marche à faire, ce serait celle qui amène au sommet du Bláhnúkur, un volcan éteint culminant à 940 mètres, pour 500 mètres de dénivelé et environs six kilomètres de marche. Cette randonnée vous permettra de surplomber le champs de lave et les « collines » aux alentours, révélant leurs coteaux multicolores dans la lumière de l’après midi (si vous avez du bol).
En fin de journée, il sera alors temps de profiter de la source chaude réchauffant une mini-piscine naturelle à deux pas du camp. L’endroit est fréquenté, et la sortie difficile une fois immergé, mais j’ai rarement connu un tel moment de relaxation, les yeux fixant un paysage fabuleux ou s’accroche encore de la neige, et les fesses à 50°C. Gaffe, l’eau se mélange parfois moyennement, donc on peut très bien se cramer une extrémité pendant qu’une autre commence à congeler.
Bien dormi ? Cool, parce qu’il va falloir gagner un peu d’altitude et on est pas là pour passer une semaine dans la source chaude. Cette première partie n’est pas bien longue mais c’est la seule contenant du dénivelé positif, concentré sur les six premiers kilomètres. Si vous avez été sages et avez écouté mes conseils de marches aux alentours la veille, le chemin débute sur le même sentier qu’un bon nombre d’entre elles : La traversée du champ de lave de Laugahraun, puis remonte pépère jusqu’à proximité du Brennisteinsalda (que Wikipedia indique comme être un sommet rhyolitique pour les amateurs). Ce passage annonce la couleur (haha) avec des teintes verdâtres se détachant du dégradé ocre de la roche, plus un mignon petit lac en contrebas.
Le chemin passe alors par un plateau où s’accrochent encore pas mal de névés, puis joue au grand huit une fois arrivé à la zone géothermique de Storihver. C’est ici que vous pourrez approcher de ces gros trous gargouillants crachant vapeur et eau à ébullition sur le sable noir et le randonneur imprudent.
La pente remonte alors un peu en arrivant vers un col où vous trouverez un mémorial pour un certain Ido Keinan, décédé dans le blizzard à l’age de 25 ans à peine le 25 juin 2004 à seulement 1 kilomètre du refuge… Son histoire tragique illustre bien les dangers latent de toute randonnées en milieu extrême, même si les bonnes conditions peuvent parfois les faire oublier. C’est d’ailleurs la zone la plus sujette au mauvais temps. En cas de brouillard, de pluie ou pire, il est indispensable de suivre les piquets plantés tous les dix mètres et de ne surtout pas s’aventurer à l’aveuglette. En cas d’arrêt forcé, l’équipement est important et si vous avez de quoi vous tenir chaud, il est préférable d’attendre la fin du grain plutôt que de se perdre sur ces hauteurs désolées.
Une fois le col passé, vous aurez alors une vue plongeante sur la vallée en contrebas, et le refuge de Hrafntinnusker tout proche (plus facile à écrire qu’à prononcer).
Le refuge peut faire office de coin pic-nique si vous souhaitez prolonger la marche jusqu’à Álftavatn (dans ce cas c’est 12km de plus au compteur) ou du camp pour la nuit, avec possibilité de poser la tente dans des petits abris de pierre ‘achement mignons et pratiques pour se protéger du vent. Attention, comme pour tous les refuges du Laugavegur il faut bien sûr payer pour camper, mais le prix ne concernent que l’emplacement. Pour utiliser la cuisine, mais aussi avoir le droit de mettre les pieds dans le refuge, il faudra payer un extra, ce qui peut sembler légèrement abusé, les prix augmentant d’ailleurs un peu plus chaque année. L’accès aux toilettes sèches est quand à lui compris dans l’emplacement. Ouf.
Pour occuper son après-midi, il existe quelques petites randos autour du refuge. Le Hrafntinnusker (la montagne) est à trente minutes de marche vers le nord-ouest, et un autre sommet dont le nom m’échappe offre une vue magnifique sur la vallée à quinze minutes au nord-est. Attention, vous verrez peut-être de la retape pour les caverne de glaces à proximité, mais l’augmentation des températures les a faites fondre récemment. Pas glop.
L’étape suivante commence assez facilement en suivant le chemin le long de la vallée-plateau, entre névés, graviers noirs et sources géothermiques laissant dans leurs sillages un tracé de mousse verte détonnant particulièrement dans cet environnement sombre. Les plaques de neiges peuvent parfois masquer le chemin et rendre les descentes et remontées dans les irrégularités du terrain un tantinet acrobatiques.
Après quelques kilomètres, vous verrez sur votre gauche le Háskerðingur, une montagnette relativement facile à grimper si vous laissez votre sac à dos vous attendre en bas. Il n’y a pas de chemin à proprement parler mais l’ascension, pas bien difficile, devrait vous emmener au sommet en une petite demi-heure et vous offrir une vue bien sympatoche sur les alentours.
En reprenant la marche, vous arriverez bientôt à l’extrémité du plateau et pourrez voir loooin en contrebas le lac où se situe le refuge d’Álftavatn. Mais avant d’y arriver, il va falloir se taper un dénivelé négatif bien méchant, surtout pour les genoux. Les bâtons de marche m’ont été d’une grande aide sur ce passage, et si vous souffrez, consolez vous avec la tête des gens que vous croisez qui eux se la farcissent dans l’autre sens. C’est mesquin mais ça soulage.
Une fois de retour sur le plancher des chèvres, vous découvrirez avec joie qu’il existe de l’herbe sur cette foutue île, et aussi des rivières, bien larges et bien froides. Ca tombe bien, c’est le moment du passage de votre premier gué. Comme je suis un peu con, j’avais décidé de ne pas prendre de sandales pour gagner un peu de poids, et punaise j’ai regretté ce choix. Ca ne changera rien à la température de l’eau mais sans ce genre de godasses, les petits cailloux instables du fond se feront un plaisir de glisser sous vos pattes et de rentrer dans vos pieds pile là ou ça fait mal, le poids du sac à dos n’aidant bien sûr absolument pas. Sans bâtons de marche pour s’équilibrer, c’est aussi un peu la gamelle assurée.
La dernière partie se fait sur un riant petit chemin bien vert avant d’enfin arriver au lac, et au refuge d’Álftavatn, déjà un peu plus grand que le précédent. Si à Hrafntinnusker les emplacements de tentes étaient bien délimités et espacés, ici c’est la course au terrain droit et stable. Vu que beaucoup de monde arrive directement du Landmannalaugar, c’est aussi bien plus peuplé. Sortez les boules Quies et vous n’entendrez peut-être pas Jason se plaindre pendant une heure à Jessica de l’odeur de ses chaussettes.
Pour info, il existe un autre refuge à trois kilomètres de là, Hvanngil. Un peu plus intimiste. il me semble que celui-ci n’accepte pas le camping, donc réservation obligatoire, mais c’est à vérifier.
Bon la pas le temps de se réchauffer les orteils, le premier gué est a à peine 500 mètres. Même mayonnaise que pour le précédent, pensez tout de même à bien attacher vos chaussure au sac, et surtout assez haut pour qu’elles ne touchent pas la flotte. Oui c’est évident, mais oui c’est du vécu. Après avoir passé Hvanngil, le chemin traverse une première rivières équipée d’un pont cette fois, puis un autre passage à gué où il faudra encore se mouiller les guiboles. Celui-ci est d’ailleurs moins profond, mais bien plus large. Attention aux trous invisibles, ils sont traitres.
A partir de là, apprêtez vous à marcher plusieurs kilomètres dans le Mordor. En effet, le chemin passe par un sandur, une pleine de sable formée par les alluvions glaciaires, entourée de monts noirs comme l’âme de Wauquiez. Alors c’est beau hein, mais qu’est ce que c’est loooong. Au moins le tracé est clair et vous emmènera finalement à un petit col s’ouvrant sur un paysage un peu plus vallonné, et où, après les kilomètres finaux, le refuge d’Emstrur apparaitra au détour d’une collinette.
Ce refuge dispose d’un espace de camping en contrebas offrant des places bien délimitées à proximité d’une petite rivière chantante. Une fois les affaires posées, et si le temps le permet, il est temps de partir pour une mini-marche d’un peu plus de trois kilomètres qui vous emmènera sur l’un des plus beaux points du parcours : Le canyon de Markarfljótsgljúfur.
Cette petite boucle assez plate démarrant à 500 mètres du refuge en direction d’Álftavatn permet d’admirer un canyon profond de 200 mètres assez dantesque, le chemin étant littéralement délimité par le vide. Les possibilités d’arrêts pic-nique sont nombreuses et les points de vue assez dingues. L’ayant fait l’après-midi, et malgré le soleil de minuit, le canyon était en grande partie dans l’ombre. Pour les fanas de photos, la lumière matinale est peut-être plus adaptée pour shooter la gorge. Prévoir un grand angle, ou alors beaucoup, beaucoup de recul.
Vers le sud, il est possible d’observer un plateau glaciaire sur votre gauche, ainsi que le canyon s’élargissant et devenant une petite vallée serpentante en direction de Þórsmörk. Ça tombe bien, c’est exactement le chemin du lendemain.
Cette étape débute par une descente assez abrupte, un pont sur une rivière rugissante puis la traversée du plateau évoqué précédemment. Après une dernière petite montée, vous voilà sur le chemin suivant de haut la rivière pratiquement jusqu’à destination. Pas grand chose de spécial à noter sur cette partie très jolie, mais assez répétitive faut être honnête. Environs quatre kilomètres avant l’arrivée se trouve le dernier passage à gué du parcours. Accrochez vous, celui-ci est costaud avec des bras multiples et une eau assez opaque masquant facilement les pièges sous-marins. Après ce plongeon, le paysage devient progressivement de plus en plus vert et les arbustes chétifs se transforment doucement en arbres. Bon, des arbres islandais hein, on est loin du chêne centenaire, mais vous voici tout de même dans l’un des seuls espaces « boisés » de l’ile, compris dans les 1,4% du territoire à être considéré comme forestier.
A l’arrivée des vikings, l’Islande était très feuillue, les forêt couvrant alors 30% du territoire, mais les premiers colons ont entamée une déforestation rapide permettant la colonisation. Les animaux domestiques broutant alors le peu de végétaux tenant tout ça à peu près en place, l’érosion s’est accentuée de manière exponentielle donnant le paysage désertique polaire qu’on connaît aujourd’hui. Néanmoins, les initiatives de reforestations se sont bien développées au cours du dernier siècle, et tout doucement, l’Islande reverdit.
Mais bref, tout ça pour dire qu’il est plus difficile de s’orienter une fois arrivé à Þórsmörk, les arbres bordant le chemin pouvant bloquer la vue. Il existe trois campings sur la zone, donc suivez bien les panneaux vers celui de votre choix. Ce serait con de devoir couper à travers les buissons et finir empalé sur un bouleau pubescents.
Parlons des campings justement. Trois choix s’offrent à vous suivant vos plans ultérieurs :
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Volcano Huts : Grand, classe, sympa avec un p’tit restau pas piqué des hannetons et une grande pelouse type jardin anglais pour poser la tente. C’est le camping le plus proche de la route (même si les bus passent aussi par le camping de Basar) et peut être l’arrêt idéal si votre randonnée s’arrête là et êtes pressés de repartir vous réchauffer les extrémités au Blue Lagoon. Il peut aussi être utile si vous souhaitez continuer jusqu’à Skógar mais voulez passer au moins une soirée à manger une bonne bouffe dans un grand chalet en bois (voir profiter du sauna-tonneau), mais dans ce cas attention, cela rajoutera 4 kilomètres à la dernière étape longue déjà de 25 bornes . Ca peut faire beaucoup.
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Basar : Petit, mignon, avec un mini-shop à la réception et des emplacements de tente plus sauvages, c’est le camping parfait pour démarrer tranquillement la marche vers Skógar.
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Langidalur : Camping de poche pile entre les deux du haut, pouvant être un bon compromis.
Quel que soit votre choix, essayez tout de même de faire la petite marche reliant Volcano Huts à Langidalur via le sommet du Valahnúksból. Une fois là haut, le point de vue offre une vision à 240 degrés sur les affluents glaciaires noirs entourés de montagnes émeraudes. C’est LE paysage de la vallée à ne pas rater.
Cette dernière partie est assez particulière. Déjà, il s’agit de l’étape la plus longue, bien que le refuge de Fimmvoruhals permette de couper la marche en deux. Attention, le coin est méchamment exposé aux éléments et camper peut se révéler difficile sur un terrain très accidenté. La meilleure option est donc de réserver un lit, mais il faudra dans ce cas s’y prendre bien à l’avance. Ensuite, si la marche entre Basar et Fimmvoruhals offre des points de vue tout bonnement hallucinants, la redescente vers Skógar est, parait-il, un peu plus meh, le chemin n’en finissant pas de serpenter sur quinze bornes tout en laissant les plus beaux paysages derrière vous. Ca reste splendide hein, le chemin étant ponctué de pas moins de 26 chutes d’eau, mais ce n’est clairement pas le pinacle du voyage.
Personnellement, je comptais bien finir la randonnée à Skógar, mais mes genoux commençaient à montrer quelques douloureux signes de fatigue (sac trop lourd, grand classique). J’ai donc posé la tente et les affaires superflues à Basar avant de faire l’aller-retour entre le camping et Fimmvoruhals avec un sac poids plume dans la journée, pour repartir en bus 4×4 à Reykjavik le lendemain sans avoir besoin de m’amputer les deux jambes.
Au départ de Basar, le chemin démarre doucement le long de l’affluent glaciaire avant de commencer à monter en s’engageant dans la végétation. Celui-ci sort assez rapidement des arbres pour offrir déjà de superbe vues sur Þórsmörk et les glaciers alentours. Après une première vue dégagée sur la base du glacier Mýrdalsjökull, on attaque la première vraie montée assez costaude pour arriver sur un immense plateau rocailleux où le chemin continue sur quelques kilomètres avant de reprendre un dénivelé bien raide. Attention sur ce passage, la vue est belle mais les cailloux sont traîtres et la pente est vraiment abrupte. Une fois cette épreuve passée, le randonneur fourbu est récompensé par l’arrivée sur le champ de lave de l’Eyjafjallajökull. Yep, il s’agit bien des traces de l’éruption ayant méchamment perturbé le trafic aérien européen pendant quelques semaines en l’an de grâce 2010 (et plus grave, ayant inspiré Dany Boon a commettre un film).
Vous êtes maintenant sur le plateau de Godaland, entre les glaciers de l’Eyjafjallajökull et de Mýrdalsjökull. Sur votre droite, vous croiserez les cratères Magni et Móði, surgis lors de la fameuse éruption. Il est possible de les grimper afin de profiter d’une vue à 360° sur une bonne partie de la région.
Si le coeur vous en dit, et q’u’il vous reste de l’énergie après ces 1000 mètres de dénivelé, vous pourrez marcher les derniers kilomètres vous séparant du refuge de Fimmvoruhals, endroit parfait pour une pause bouffe. Pour le retour, vous pourrez soit emprunter le même chemin, soit une variante vous ramenant un peu plus près du camping Volcano Hut. Attention, le marquage est bien moins présent hors des chemins habituels, donc gaffe.
Voilà en somme un bref résumé du Laugavegur. Concernant les détails pratiques, je n’approfondirai pas des masses car toutes les informations type logements-transports, se trouvent facilement en deux coups de clic. Question équipement, rien qui ne sorte vraiment de l’ordinaire pour une marche en autonomie de quelques jours, mis à part des sandales pour les gués et des bâtons de marche (sans dec’, ça change la vie).
Lors de ma randonnée, la météo a été incroyablement clémente mais ce n’est pas toujours le cas, donc quelques surcouches imperméables sont obligatoires. Enfin, il est très facile d’y aller à l’économie en n’utilisant les refuges que pour camper et emmener sa propre popote et un réchaud. Pour l’eau, un bon camelbak fera l’affaire avec possibilité de le remplir soit aux refuges, soit dans les rivières traversées. Pas besoin de la faire bouillir, l’eau sauvage y est d’une excellente qualité. L’orientation est par contre très importante, et même si le chemin est bien balisé, il vaut mieux savoir où l’on se trouve en cas de grain. Le GPS n’est pas forcément obligatoire, bien que les gardiens de refuge puissent bloquer les randonneurs en étant dépourvu en cas de gros brouillard, mais une carte détaillée (en vente dans tous les offices de tourisme de Reykjavik) est le minimum.
CONCLUSION
Voilà, vous savez tout. Néanmoins, comme partout, soyez un marcheur sympa. Le Laugavegur est très fréquenté pour une marche en Islande, et même si l’environnement semble mort, il n’en reste pas moins fragile. Ramassez tous vos déchets, même les organiques – ceux-ci ne se biodégradant pas dans ces températures – soyez cool avec les locaux pouvant parfois passer pour un peu rêches (mais pas vraiment au fond. C’est l’hospitalité scandinave) ainsi qu’avec vos compagnons randonneurs parfois pas très discrets et tout se passera bien. Les frenchies gardent une assez bonne réputation là haut, autant essayer de le conserver encore un peu.
One Comment
Sympa l’article. J’y vais 10 jours en mars, je me réjouis de découvrir cette île magnifique sous la neige et la glace. Et le rêve fou d’y voir des aurores boréales. A plus.