Une petite touche de Svalbard

For the english version of this post, it’s over there.

Disons que vous êtes fan des contrées nordiques. Que Jack London et Fridjtof Nansen (1) sont au panthéon de vos héros personnels. Que vous dormez la fenêtre ouverte en hiver car, soyons honnête, qui pourrait dormir dans une chambre surchauffée à 9°C ? Qu’aucune de ces affirmations ne vous correspond mais bah, le froid c’est pas si mal après tout ?

(1) Vous n’avez jamais entendu parlé de ce gars ? Allez vous renseigner ! (et lisez « Farthest North » tant que vous y êtes). Probablement l’un des explorateurs les plus couillus à avoir existé.

Vous avez du bol, j’ai l’endroit parfait pour vous.

LE SVALBARD

Sommaire

INTRODUCTION

Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais il est difficile de nier que sa simple prononciation résonne d’échos lointain, froids et profondément nordiques. Ce n’est pas vraiment une surprise étant donné que « Svalbarð » veut littéralement dire « Rivages froids » en vieux Norse, la langue viking originale. Même s’il n’existe aucune preuve qu’un seul de ces casques à cornes y ait jamais posé le pied, ces îles, situées à un saut de puce du pôle nord, offrent tout l’éventail des représentations associées à ce milieu telles qu’elles existent dans l’inconscient collectif.

Quand je dit saut de puce, ce n’est pas seulement une image. Longyearbyen, la capitale – et seule « ville » – du Svalbard est installée à environs 1316 kilomètres du toit du monde (et 766 kilomètres au nord de la côte norvégienne la plus proche). A titre de comparaison, si vous marchiez cette distance à partir du pôle sud, il vous resterait encore 300 bornes à parcourir pour atteindre le rivage du continent Antarctique.

Cet archipel est aussi connu sous son ancien nom, Spitzberg. A ne pas confondre avec l’île habitée principale dont le nom actuel est Spitzberg, qui s’appelait auparavant Spitzberg Occidental. Ce nommage compliqué ne représente que la partie émergée de l’iceberg (haha) concernant l’étrange statut de ce paradis blanc.

L’histoire du Svalbard est un roman en soi, un peu trop longue pour être explorée en détail ici mais quand même ‘achement intéressante. Elle contient beaucoup de points commun avec le Far West dans le sens où ce passif est presque tangible via les nombreuses marques du passé toujours visibles et conservées, apportant une aura de territoire sauvage dont la colonisation est encore très récente : Vieilles mines en plein air, piège à renards centenaires (les pièges, pas les renards), villes fantômes et tant d’autres choses, comme un témoignage à ciel ouvert d’un temps révolu.

La mine 2B. Abandonnée et maintenant fermée au public, ces vieux bâtiments surplombent Longyerbyen, figés dans le temps.

HISTOIRE DU SVALBARD

Des origines à nos jours

Officiellement découvert en 1596 par les Pays-Bas, l’archipel a été utilisé comme base avancée pour la chasse et la pêche à la baleine par les français, anglais, danois et néerlandais jusqu’en 1820, date a laquelle nombre d’entre eux se déplacèrent dans d’autres lieux arctiques. A la fin du XIXème siècle, les Norvégiens prirent conscience des énormes réserves en charbons présentes en sous-sol et ouvrirent leur première mine en 1899, suivis par des intérêts anglais et américains. Tout allait bien dans le meilleur des mondes jusqu’à ce que certains commencent à se demander : « Au fait, ça appartient à qui ce trou paumé en vrai ? »

Ainsi commencèrent en 1910 les négociations afin de s’y retrouver un peu dans tout ce bordel, interrompues par la première guerre mondiale, rétablies à l’armistice, pour se terminer avec la signature du Traité du Svalbard en 1920. La conclusion ? Le Svalbard appartient à la Norvège (Så fint !), mais tous les pays signataires se voient accorder les droits de pêche, chasse, et exploitation minière sans limitation de durée (Oï).

Durant la seconde guerre mondiale, de nombreux évènements hallucinants se sont passés la haut – que je vous invite à creuser si cela vous intéresse ou que vous avez un peu de temps à perdre – mais la situation s’est stabilisée peu de temps après. La Norvège redémarra ses opérations à Longyearbyen (la capitale) et Ny-Alesund (une colonie un peu plus au nord) pendant que les soviétiques ouvrirent des mines à Barentsburg, Pyramiden et Grumant (puis en fermèrent deux en 1962 et 1998). La situation est plutôt calme depuis.

Pour clore le volet Histoire/Géopolitique, le Svalbard est officiellement un territoire norvégien, mais n’est inclue ni dans la communauté européenne, ni dans l’espace Schengen. Ce fait est important car il n’est pas nécessaire d’obtenir un visa pour s’y rendre, mais il est préférable d’y embarquer son passeport. Le Svalbard n’est pas considéré comme un comté mais est administré par un gouverneur spécial nommé par le gouvernement norvégien.

Conformément au traité du Svalbard, la colonie russe de Barentsburg existe toujours, bien qu’étant la dernière. Ce territoire reste d’une importance stratégique pour la Norvège, particulièrement en cette période de fonte des glaces et d’ouverture de nouveaux accès aux ressources situées autour du pôle. La situation envers la Russie est stable pour le moment, mais il est impossible de prédire ce que le futur réserve à ce petit paradis pour ours blancs.

Le Svalbard contemporain

Ce qui nous amène au Svalbard actuel. Bien que l’exploitation minière soit toujours d’actualité à Longyearbyen, Sveagruva et Barentsburg, Ny-Alesund est maintenant une base de recherche ouverte au scientifiques du monde entier. Longyearbyen, détenant toujours le records de la capitale territoriale la plus nordique du monde, s’est aussi beaucoup ouverte à la recherche (via l’ouverture d’une université) et bien sûr, au tourisme.

Ouep, voilà à quoi ressemble une ville s’ouvrant au tourisme la haut.

L’industrie touristique au Svalbard s’est développée de manière exponentielle au cours des vingt dernières années, augmentant grandement les possibilités de découverte de l’environnement sauvage. Attention, le repos est une notion assez vague lorsqu’il s’agit de passer du bon temps par la haut, et parmi toutes les options offertes, aucune n’est bon marché. L’une des raisons pour cela est qu’aucun voyageur n’est autorisé à franchir les limites de la ville sans être accompagné par un guide équipé d’un fusil. Le risque lié au ours polaires est une réalité, et si vous survivez à une attaque, il est fort probable que vous soyez inculpé pour comportement inconsidéré lorsque vos membres auront été rattachés à votre corps. Raison de plus pour ne partir explorer qu’au sein d’une équipe de professionnels.

DECOUVRIR LE COIN

Bien, maintenant que vous êtes décidés, quel est le meilleur moyen pour découvrir cet élevage de lichen ? Vous pourriez simplement acheter un billet d’avion pour Longyearbyen, réserver une chambre dans l’un des rares « hôtels » locaux et partir à la journée pour une courte expédition proposée par les agences locales. C’est un bon compromis pour un premier contact, mais le rapport qualité/prix d’une organisation de ce genre peut rapidement devenir intenable. Le prix des logements pète les plafonds et les sorties à la journée ne vont emmèneront pas bien loin. Si ce type de climat est une découverte pour vous, cela peut-être un premier contact honnête, mais si vous êtes plus familier des aventures arctiques, ou que votre budget est serré, je recommanderai une autre approche: Le voyage tout en un.

Ce type de voyage offre, à mon avis, le meilleur rapport expérience/prix possible. Beaucoup d’agences à travers le monde proposent ce type d’aventures, incluant le billet d’avion, l’hébergement à Longyearbyen, et une expédition de plusieurs jours en ski de randonnée, kayak, raquettes, randonnée ou motoneige, tout en campant le long du trajet. Le principal inconvénient est qu’il s’agit de voyages en groupe. Les participants s’inscrivant pour ce genre d’expédition sont généralement sympatoches et ouverts, mais si vous êtes du genre solitaire, cela peut-être un problème. Ces excursions peuvent être difficiles par moment et vous pousser, ainsi que vos compagnons, vers vos limites, ce qui peut-être source de tensions. Personnellement ça ne m’a pas dérangé, mais mieux vaux être prévenu.

Et les avantages ? Si je devais les expliquer vous ne seriez certainement pas en train de lire ces lignes, mais disons simplement que peu de voyages offrent l’expérience de calmement observer le soleil de minuit pendant votre quart de veille à l’ours, recherchant un point blanc se rapprochant lentement des tentes où vos compagnons dorment. Un éclaboussement dans le fjord vous fait tourner la tête, et derrière les bébé pétrels se débarrassant de leurs plumage juvénile sur la plage, vous observez quelques bélugas nageant calmement le long du rivage, entre le sable et les iceberg s’éloignant doucement. Oui, c’est un vrai souvenir, et oui, vraiment peu de voyages offrent cette expérience.

Est-ce que ce tas de neige… bouge ?

Au printemps (c’est l’hiver en fait)

Il existe deux saisons principales ouvertes pour ce genre d’excursions, s’étalant entre mars et fin septembre, offrant chacune leurs activités préférentielles. Si vous recherchez une aventure en ski de randonnée, le printemps est la meilleure période. Alors que la nuit polaire s’éloigne, lentement remplacée par la lumière du jour, la neige toujours présente recouvre Longyearbyen et les fjords du même manteau blanc. Vous serez équipé d’une pulka, avec tout l’équipement nécessaire réparti équitablement entre tous les participants, et partirez soit de Longyearbyen ou serez déposés dans la nature après un voyage chaotique au sein d’un monstre à chenille.

La première option vous emmènera généralement le long de la côte avec un arrêt à Barentsburg et/ou Pyramiden, les colonies russes respectivement habitées et abandonnées. Il s’agit probablement des deux derniers endroits sur terre ou vous pourrez observer l’éventail complet du style architecturale soviétique post seconde guerre mondiale. Statues de Lenine toujours dressées et oeuvres de réalisme socialiste sont légions. Barentsburg possède un hôtel, un magasin de souvenirs et quelques autres établissements, incluant des locaux typiques qui vous feront connaître toute l’éventail de l’hospitalité russe (2). Pyramiden quand à elle est une ville fantôme figée dans le temps. Abandonnée il y a peu, il s’agit probablement d’un des lieux les plus étranges/sinistre d’Europe. Je n’en dirai pas plus car c’est un endroit qui se visite plus qu’il ne se décrit, et n’y ayant jamais mis les pieds personnellement, mais ayant prêté oreille aux voyageurs s’y étant rendu, je ne vais le spoiler ni pour vous, ni pour moi.

(2) De ce qu’on m’a dit, c’est un étrange mélange de profonde et extrême gentillesse et de concours de regard de la mort.

La deuxième option (3) vous embarquera à bord d’une vibrante et toussante carriole montée sur chenille atteignant la vitesse incroyable de 20km/h en pente et le vent dans le dos. Vous serez serré comme huit sardines en boite dans la voiture arrière, évitant les bagages vous tombant sur le coin de la tronche (ou inversement) tout en berçant les deux chiens de traineau en espérant que leur nausée n’entrainera pas un nouveau degueuli dans un environnement aussi confiné.

(3) Cette option est celle que j’ai expérimenté, et sa description est liée à un voyage réalisé en mars 2015 avec une agence spécifique. D’autres destinations sont possible, donc l’expérience peut varier selon votre choix de voyage et d’entreprise.

Franchement, ce fut une expérience mémorable.

La Grosse Boite Grise De La Mort.

Pour cette expédition précise, la machine du diable nous déposa à une centaine de kilomètres de Longyearbyen, au sud-est du parc national de Sassen-Bünsow, dans un blizzard grondant ayant enseveli instantanément la moitié de notre matériel. Le but fut de rejoindre la ville sous dix jours, en suivant un itinéraire constitué de glaciers, de banquise, de cols montagneux et vallées interminables, de terrains réguliers et chaotiques, de montagnes immaculées et de mines géantes. J’avoue que ce ne fut pas facile. Les premiers jours furent constitués de petites étapes, les pulkas étant chargées à bloc, se rallongeant peu à peu au fur et à mesure que le poids diminuait. Nous éprouvâmes un soleil aveuglant, des tempêtes de neige, des températures s’étalant entre -30°C et 0°C, ou 0°C semblait estival une fois l’habitude prise de décongeler sa barbe. Certains jours nous avancions rapidement, d’autres nous dûmes faire du sur place à cause du mauvais temps ou d’un participant au bout du rouleau. Tous ces éléments firent évoluer massivement l’itinéraire, le guide adaptant constamment la route en fonctions des conditions.

Nous atteignîmes Longyearbyen épuisé, brulés par le soleil et désespéré pour un bout de viande frais après une route inoubliable de 150 kilomètres. Pas d’ours polaires cette fois, seulement des empreintes de pattes de la taille de ma tête, mais phoques et rennes furent de la partie, et l’expérience humaine acquise fut inestimable. Il y eu quelques moments de tension bien sûr, mais ils n’ont jamais assombris l’expérience humaine collective qu’a été ce voyage. Cela peut sembler assez éloigné du concept de vacances, mais je garantis que ce genre d’expérience est un trésor pour qui est adepte d’expéditions physiques en territoires « vierges ».

Il y a des endroits pires pour perdre une carte mémoire.

Voilà pour la partie printanière. Quid de l’été ? He bien le paysage est très différent c’est certain.

En été

Grâce au gulfstream, le Svalbard est étonnement tempéré considérant sa latitude, avec une température moyenne de -14,7°C en janvier contre 6,7°C en juillet, faisant fondre la neige pendant les mois d’été et transformant la couverture blanche en une tinte un peu plus boueuse. Donc terminé pour le ski, mais il est temps pour le kayak de prendre le relai.

L’offre est vaste pour cette activité, du tour de fjord à la journée aux expéditions de plusieurs semaines le long de la côte. Une nouvelle fois, je recommande la seconde option, permettant une expérience bien plus complète d’une aventure polaire. L’été réveille aussi la vie sauvage, avec des occasions plus nombreuses d’observer ours blancs, renards polaires, morses et phoques. L’ornithologie est aussi à son maximum entre juin et aout, période de reproduction de la plupart des volatiles pensant que l’endroit avait l’air sympa pour élever des gamins. Les expéditions lointaines sont donc les meilleurs pour observer bestioles et bébés dans leur environnement naturel.

Non mais regardez ces mini-becs !

Pas facile d’être une mère célibataire.

En juillet 2012, j’ai participé à une expédition dans la zone du Kongsfjorden, proche de Ny-Alesund. Ce voyage, offrant un bon équilibre entre pratique du kayak, étapes et randonnées n’était comme d’hab’ pas donné, mais encore une fois, offrait une expérience unique. Pas de bulldozer maudits pour rejoindre la zone cette fois, mais une traversée de 12 heures à bord de la fierté des vaisseaux d’expéditions Svalbardien, le MS Farm. Cette coque de noix tenait la mer, c’est sûr, mais nom de dieu, quelle balade humiliante. Le marin en moi s’étant toujours vanté de n’avoir jamais éprouvé de mal de mer s’est bien vite mangé une bonne dose de réalité dans la tronche. Difficile d’apprécier le paysage quand on est bloqué en position foetal dans une cabine surpeuplée, remplie de compagnons vomissant tour à tour leur volonté de vivre.

Contre toute attente, nous survécûmes. Ainsi commença un voyage de dix jours dans un lieu trop incroyable pour être décris. Le camp fut monté tous les deux ou trois jours, nous permettant de nous concentrer sur la navigation ou les marches le longs des glaciers, tout en contournant icebergs et simili-banquise, nous rapprochant des lieux de reproductions tout en étant attaqué par des sternes féroces aux becs aiguisés, avant d’enfin diner dans la tente principale et de s’assoupir au creux d’un sac de couchage serré sous le soleil de minuit.

En parlant de lumière tiens, une des particularité des voyages estivaux au dessus du cercle polaire est la luminosité. La plupart d’entre nous sommes inconsciemment programmés par le fait que le soleil se lève à l’est et se couche à l’ouest, et nous cartographions notre environnement avec cette donnée fondamentale. La haut, le soleil réalise une boucle autour de vous toute la journée et toute la nuit, offrant des perspectives surnaturelles. Il est difficile de mettre précisément le doigt sur ce qui cloche, mais l’inconfort provoqué par la splendeur des heures immobiles de la nuit, baignée d’une lueur dérangeante provenant d’un soleil en rase motte alors que toutes les fibres de votre être hurlent que ce globe lumineux ne devrait JAMAIS se trouver au nord, est simplement indescriptible. Bien sûr, cet effet de lumière est commun à tous les lieux situés sous cette latitude, mais à part peut-être le Groenland, peu d’entre eux offrent, pour aller avec, le combo fjord / glaciers / montagnes comme le Kongsfjorden.

Sans déconner, il est quelle heure ?!

Malheureusement, aucun ours polaires à l’horizon cette fois ci non plus, à part ces gigantesques traces de patounes ici et là. Les rennes du Svalbard furent néanmoins nombreux, plus quelques renards polaires assez courageux pour essayer de me tirer une botte. Concernant les oiseaux, ce fut un impressionnant festival : Sternes arctiques, labbes, petits pingouins, macareux, fulmars, plongeons catmarins, la très rare mouette ivoire et bien d’autres purent être observées, vivant tranquillement leurs vies ou nous attaquant à vue pendant nos fuites éperdues. Bon souvenirs.

L’expédition prit fin avec une bière partagée dans le seul Pub de Ny-Alesund, entourés de scientifiques heureux de voir de nouvelles têtes, ou avec des avis très tranchés sur l’industrie du tourisme contaminant des lieux jusqu’ici préservés. C’est un point de vue intéressant que je développerais plus bas.

Au retour du MS Farm, nous fûmes partagés entre la joie de rejoindre la civilisation, la tristesse de quitter cet endroit, et la terreur absolue que cette usine à vomi représentait. Et usine à vomi il devint à nouveau, mais je ne m’étendrai pas sur cette perte absolu de dignité et de respect personnel.

Pour les personnes intéressées, j’ai réalisé il y a quelques année une courte vidéo de ce voyage, visible ici même.

A la prochaine, p’tit coin de paradis congelé.

EPILOGUE ET RÉFLEXIONS

J’espère que ces deux courtes descriptions des mes deux voyages au Svalbard vous aurons fournis un aperçu de ce qu’une excursion dans ce petit joyau d’archipel peut offrir. Encore une fois, il existe de nombreuses autres formules adaptées à tous les goûts, de la croisière arctique au camp statique et bien d’autres.

Étonnement, le Svalbard n’est pas l’endroit le plus adapté pour la chasse aux aurores boréales étant donné que l’archipel est un peu trop nordique par rapport à la zone aurorale. De plus, le ciel est souvent couvert en hiver et la température est plus supportable en Norvège continentale pour les longues observations à l’extérieur lors des nuits hivernales.

Maintenant, concernant les sujets un peu plus sensibles. Voyager au Svalbard est très cher, impossible de le nier. Y partir en vacances n’est pas seulement le signe d’une curiosité pour l’Arctique, mais aussi la preuve que vous faîtes parti des rares privilégiés capables de dépenser plusieurs milliers d’euros / dollars pour un voyage de moins d’un mois. C’est un fait important à garder à l’esprit car certaines personnes (mais heureusement peu) rencontrées peuvent se montrer assez condescendantes et un peu déconnectées lorsqu’il s’agissait d’appréhender ce privilège. D’après mon expérience, même si le grand nord n’attire pas forcément les foules, énormément de personnes adoreraient le découvrir s’ils en avaient l’opportunité, le temps, et surtout les finances. C’est un peu la même problématiques pour beaucoup d’autres voyages « alternatifs » autour du monde, particulièrement dans la communauté des backpackers, mais c’est un autre sujet que j’aborderai probablement dans un prochain post.

Ce qui nous ramène à l’opinion de certains scientifiques mentionnés plus haut. Pourquoi ouvrir au tourisme des lieux jusqu’ici préservés, en particulier lorsque ce tourisme augmente d’année en année. Je comprends ce point de vue et n’ait pas de réponse simple à y apporter.

Je pense néanmoins qu’il est important d’informer le public sur les sujets d’actualités qui ne les affectent pas directement dans leur vie de tous les jour, tel que le réchauffement climatique, et le Svalbard est un endroit particulièrement intéressant pour cela. Les glaciers du Kongsfjorden par exemple reculent à un rythme alarmant, et en être un témoin direct est une vraie leçon d’humilité. Le musée de Longyearbyen souligne cette problématique, et le sujet arrive généralement rapidement lors de conversations avec les locaux. Je suis donc persuadé que le tourisme au Svalbard peut jouer un rôle éducatif et permettre à un certain nombre d’appréhender en direct l’urgence climatique actuelle.

L’un des nombreux glaciers en net recul du Kongsfjorden.

Bien sûr, il est certain que les hommes ont une mauvaise influence sur leur environnement (sans dec?!), même en milieu controlé, même à petite échelle. Je comprend qu’un ornithologiste puisse se sentir navré face à un groupe de guignols en parka rouge en train de prendre une photo de groupe à deux pas d’un nid de sternes, pendant que la mère orbite autour d’eux, désespérée que ces crétins de singes géants n’arrivent pas à comprendre le message.

C’est un dilemme bien réel. Je pense que nous vivons tous avec nos contradictions. L’une d’entre elle pour moi est d’être une personne de sensibilité écologique adorant la nature et inquiète du changement climatique, mais ne voyant pas trop de problème à prendre un avion, l’une des plus grosse usine à CO2, pour l’observer sur place. Je pense donc que le prix d’un tel voyage est, malheureusement, un bon moyen pour limiter une arrivée en masse de touristes polaires. De plus, même si grandissant, le tourisme au Svalbard ne peut non plus s’élargir ad vitam car limité par les infrastructures en elles-même. Cela signifie que seuls quelques privilégiés pourront contempler ses splendeurs, tout en limitant leur impact.

A l’évidence, ce n’est pas juste, mais c’est ainsi. Si d’aventure vous visitiez le Svalbard, vous faites parti d’une minorité chanceuse. Ne vous flagellez pas trop à cette idée, mais gardez la tout de même en tête. Respectez les limites, respectez le lieu, et à votre retour partagez votre expérience avec vos proches, racontez les beautés de cet archipel tout en rappelant à quel point il est fragile. Vous serez alors un témoin privilégié de ce que la nature a de plus beau à offrir.

A vous d’en être aussi son gardien.

Faites juste attention à ces gros nounours.

 

This entry was posted in Blog.

One Comment

  1. Willy Moncoiffé December 17, 2021 at 6:45 am #

    Super récit Vincent ! Très intéressant et marrant à lire 😉

Post a Comment

Your email is never published nor shared.